CfP/CfA Veranstaltungen

Les comédies musicales : entre onirisme et réalisme

Beginn
15.10.2020
Ende
16.10.2020
Deadline Abstract
19.06.2020

Appel à communications :

Colloque Jeunes Chercheurs du LIS

Les comédies musicales : entre onirisme et réalisme

15 et 16 octobre 2020

Campus Lettres SHS Nancy

« Les sauts de Gene Kelly de flaque en flaque, la voix vibrante de Judy Garland quelque part au-delà de l’art en ciel, les pas de deux, joue contre joue de Fred Astaire et Ginger Rogers… Comment expliquer cette euphorie toujours renouvelée qu’offre le spectacle des comédies musicales ? »

Fanny Beuré

           

L’engouement pour la comédie musicale ne date pas d’hier, « de Singin’ in the Rain à La La Land, en passant par West Side Story ou Les Demoiselles de Rochefort, les comédies musicales émeuvent et transportent des générations de spectateurs depuis l’invention du cinéma parlant » (Isabelle Wolgust). Même si le terme apparaît en Italie au XVIIIème siècle (commedia musicale), c’est aux Etats-Unis que le genre tel qu’on le connaît se développe sur les planches à partir de The Black Crook en 1886 avant de prendre son véritable essor à la fin des années 20 sous l’impulsion de George Gershwin et de ses œuvres comme Funny Face puis de Richard Rodgers et Oscar Hammerstein II qui proposent notamment The King and I ou The Sound of Music. Le phénomène arrive rapidement en France chez qui comédie musicale et spectacle musical se confondent régulièrement. Etudier la comédie musicale aujourd’hui c’est donc à la fois réfléchir à la place historique de ce type de production si cher à la culture de masse, mais aussi réfléchir à son évolution, à son réinvestissement dans des sociétés post-modernes en quête d’identification et de divertissement.

Certaines œuvres musicales marquent tellement qu’elles ne cessent de tourner ou d’être réadaptées : West Side Story, The Rocky Horror Picture Show, Starmania, Emilie Jolie, Cats, The Lion King, … Des planches de Broadway au cinéma en passant par les théâtres parisiens ou le dessin animé, la comédie musicale semble être partout et s’attaquer à tous les sujets, qu’elle reprenne de la musique classique (Mozart l’Opéra Rock), des groupes populaires (Mamma Mia construite autour des musiques de ABBA), des épisodes historiques (Le Roi Soleil, 1789 : Les amants de la Bastille, etc.), de grandes œuvres littéraires (Notre-Dame-de-Paris, Wicked, etc.) ou même des épisodes religieux (Jesus Christ Superstar, Les 10 Commandements, etc.).

Elle a également été largement réinvestie par la culture de jeunesse, et notamment par les studios Disney. La musique et le mickeymousing sont au cœur des productions dès la création de la firme et l’on identifie souvent les classiques Disney par leurs grandes chansons : personne n’aura échappé au phénomène Let it go… Dès son premier long métrage classique d’animation Snow White and the Seven Dwarfs, la firme influence les productions musicales et leur fabrication, notamment à Broadway, en intégrant directement les chansons au développement de l’intrigue plutôt que comme des intermèdes musicaux. Forte de son succès, l’entreprise se lance aussi sur les planches. Walt Disney Theatratical Productions a d’ailleurs fêté ses 25 ans de spectacles à Broadway en novembre dernier. S’attaquant d’abord aux parcs à thèmes où l’entreprise rencontre une fière réussite, la tradition se dessine ensuite d’adapter les succès à Broadway, au théâtre et sur les paquebots de croisière (The Beauty and The Beast,The Lion King, Frozen, etc.). Le film Enchanted vient finalement proposer en 2007 une véritable méta-réflexion sur le genre de la comédie musicale et ses ficelles telles qu’elles ont été construites et imposées par Disney. Adapté sur les planches, le téléfilm High School Musical a aussi récemment été réinvesti en série pour la plateforme Disney + (High School Musical : The Musical : The Series), démontrant, s’il en était encore le besoin, le succès que la comédie musicale rencontre tout autant dans les productions Disney Channel. Avec le rachat de la 20th Century Fox, Disney a également pu ajouter à son catalogue des productions classiques du genre : The Sound of Music, Moulin Rouge!, etc. Ainsi, les studios Disney sont inexorablement devenus associés à la comédie musicale, jouant toujours plus sur la capacité du genre à transmettre directement les émotions au spectateur.

Le genre est porteur d’évasion, il incarne l’idée d’œuvre d’art totale de Wagner, le spectaculaire, parfois même le sublime (Burke) en proposant des tableaux qui cherchent à troubler nos sens, à dépasser l’entendement : cet onirisme fabuleux des envolées musicales est pourtant souvent remis en jeu pour parler de sujets très ancrés dans notre réalité. La feintise ludique est partout dans la comédie musicale, le spectateur suspend bien volontairement son incrédulité (Coleridge) face à ces débordements spectaculaires qui, pourtant, n’empêchent pas de parler de sujets aussi sérieux et réalistes que la guerre des gangs (West Side Story) ou la vie d’une orpheline (Annie), etc. C’est cette ambivalence du genre que nous nous proposons de questionner, la subtilité du jeu entre onirisme et réalisme par lequel une histoire à laquelle le spectateur adhère se construit autour des chansons qui, dans le mécanisme classique des comédies musicales, viennent pourtant proposer des interludes enchantés qui échappent aux règles du réel.

Dans leur récit, des œuvres comme Emilie Jolie se font finalement métonymiques de l’intégralité du genre de la comédie musicale, de sa façon si particulière de se saisir de l’imaginaire pour se réapproprier et réenchanter le réel. La régularité de ses réadapatations est d’ailleurs largement significative de l’importance de cette œuvre et de son message sur la place de l’imaginaire et son pouvoir potentiel sur le réel. « Faites que le rêve dévore votre vie afin que la vie ne dévore pas le rêve », telle est la phrase d’Antoine de Saint Exupéry reprise par Philippe Châtel au cœur de son œuvre : la comédie musicale réintroduit du rêve dans la vie, dans la réalité pour permettre à celle-ci de grandir autour. Tout est rarement chanté, et même lorsque c’est le cas comme dans Les Parapluiesde Cherbourg de Jacques Demy, on a quand même le droit à de grandes envolées spectaculaires au cœur desquelles le rêve prend ses droits, repousse les limites du possible sans aucune protestation des protagonistes ou du public. Même les plus dubitatifs finissent par se prendre au jeu, comme Robert dans Enchanted qui se demande bien comment toutes le personnes présentes à Central Park peuvent connaître la même chanson et la même chorégraphie que Gisèle, qui semble pourtant l’improviser. Il se laisse cependant prendre au jeu, il laisser sa réalité s’enchanter : l’homme qui sourcillait face à une chanson finit par se battre avec un dragon sans poser la moindre question.

Face à l’importance et à la persistance de ce genre si particulier qui a conquis aussi bien la scène que le cinéma grand public, le dessin animé, ou même le cinéma underground et les séances de minuit avec des œuvres comme le Rocky Horror Picture Show, plusieurs questions se posent : Quelle est la place du spectaculaire dans nos sociétés et comment les comédies musicales toujours plus florissantes s’en font-elles le témoin ? Comment et pourquoi cette place a-t-elle évolué ? Comment, dans des sociétés désenchantées, arrive-t-on à produire du réinvestissement en liant onirisme et réalisme dans le genre de la comédie musicale ? Le réenchantement du monde (Maffesoli) est-il nécessairement spectaculaire et onirique ?

Plusieurs pistes d’étude pourront être privilégiées&nbs

  •  Les enjeux de la comédie musicale à travers plusieurs axes potentiels :

 - Quels enjeux trouve-t-on dans le format de la comédie musicale ? Peut-elle être pur produit de divertissement ?

On peut se demander ce qui amène à l’avènement de la comédie musicale et pourquoi le genre devient si populaire, sa façon de rêver et de chanter le monde lui donne une fausse image de genre léger et parfois un peu superficiel ; on l’a pourtant déjà évoqué, elle est souvent utilisée pour traiter de sujets beaucoup plus sérieux et profonds qu’il n’y paraît. Il sera alors intéressant de creuser les racines de ce genre pour observer si elles grandissent véritablement sur l’insouciance vitrine des contes de fées qui la construisent et la popularisent en bonne partie grâce à Disney.

- Comment les langages lyrique et onirique peuvent-ils devenir des outils de réinvestissement du réel ?

Les exemples d’œuvres qui se saisissent du langage musical et d’un onirisme latent pour venir questionner notre monde sont légion… On pourra par exemple retenir le film Mary Poppins dans lequel l’étrange gouvernante venue du ciel permet de remettre en cause le sens des priorités d’un père malheureux enchaîné au système capitaliste.

- Comment dans l’objet se lient imaginaire spectaculaire, divertissement et politique ?

L’opéra rock de Michel Berger et Luc Plamondon, Starmania, en pleine réadaptation actuellement vient parfaitement illustrer, aussi bien dans son parcours que dans son propos originel, l’ambivalence dont peut être porteuse la comédie musicale. Le futur mis en scène en 1979 ressemble plus qu’étrangement à notre présent et le spectaculaire devient dans l’œuvre, plus qu’un outil de divertissement, un outil politique de manipulation des foules désabusées. Il sera particulièrement pertinent de questionner le potentiel politique et sociétal du spectaculaire dont la comédie musicale se fait l’instrument.

  • Le réalisme de la comédie musicale est-il toujours un réalisme magique (Franz Roh) ?

Certaines œuvres musicales viennent s’ancrer pleinement dans notre réalité tout en lui offrant une nouvelle teinte, c’est ce qu’on peut retrouver dans les œuvres de Jacques Demy comme Les Parapluies de Cherbourg ou Les Demoiselles de Rochefort ou dans des productions comme West Side Story (en cours de réadaptation par Steven Spielberg) qui jouent à la fois de réalisme social et de clichés. Il sera intéressant de questionner cet usage particulier du réalisme.

  • Quels impacts peuvent avoir le réel et la comédie musicale l’un sur l’autre ?

On observe un double mouvement entre le réel et la comédie musicale, si certaines œuvres s’inspirent du réel, d’autres œuvres peuvent-elles aussi influer sur lui en retour ? Des titres de la comédie musicale Hair comme New Age sont devenus de véritables hymnes pacifistes contre la guerre du Vietnam, l’association Sol en Si crée Sol en Cirque, une comédie musicale sur la générosité pour inciter au don, etc. Il sera congru d’étudier des exemples d’œuvres ayant impacté à leur manière le monde les entourant.

En dehors de ces axes principaux, l’idée sera quoi qu’il en soit d’utiliser des exemples concrets d’œuvres pour montrer l’impact et l’importance de la comédie musicale depuis son avènement jusqu’à nos sociétés post-modernes, mais aussi de déconstruire et questionner les modèles, constructions et stratégies ainsi que l’ambivalence inhérente au genre.

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Bibliographie

            Fanny Beuré, That's entertainment ! : Musique, danse et représentations dans la comédie musicale hollywoodienne classique. Paris : Presses Universitaires Paris Sorbonne, « Mondes anglophones », 2019.

            Sylvie Chalaye et Gilles Mouëllic, Comédie musicale : Les jeux du désir, de l’âge d’or aux réminiscences. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 2013.

Christian Chelebourg, Les fictions de jeunesse. Paris : PUF, « Les Littéraires », 2013.

Alain Masson, Comédie Musicale. Paris : Ramsay, « Ramsay Poche Cinéma », 1994.

Michel Maffesoli, Le réenchantement du monde. Paris : Éditions de la Table Ronde,

2007.

Isabelle Wolgust, Dictionnaire de la comédie musicale. Paris : Vendémiaire, 2018.

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Comité d’organisation :

            Fantine BEAUVIEUX (Doctorante, Université de Lorraine)

            Christian CHELEBOURG (Professeur des Universités, Université de Lorraine)

            Scylla PATE (Doctorant∙e, Université de Lorraine)

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Comité scientifique :

            Fantine BEAUVIEUX (Doctorante, Université de Lorraine – Nancy)

            Christian CHELEBOURG (Professeur des Universités, Université de Lorraine – Nancy)

Laurent DI FILIPPO (Maître de conférences, Université de Lorraine – Metz)

            Matthieu FREYHEIT (Maître de conférences, Université de Lorraine – Nancy)

            Scylla PATE (Doctorant∙e, Université de Lorraine – Nancy)

            Victor-Arthur PIEGAY (Maître de conférences – Agrégé de Lettres, Université de Lorraine – Nancy)

            Matthieu REMY (Maître de conférences – Agrégé de Lettres, Université de Lorraine – Nancy)

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Les communications seront de 20 minutes (suivies de 10 minutes de questions). Les propositions (titrées et d’une page maximum accompagnées d’une présentation du communicant et de ses publications) sont à adresser à Fantine BEAUVIEUX (fantine.beauvieux@univ-lorraine.fr) et Scylla PATE (scylla.pate@univ-lorraine.fr) avant le 19 juin 2020.

Quelle der Beschreibung: Information des Anbieters

Forschungsgebiete

Literatur und Musik/Sound Studies
Musical

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Université de Lorraine / University of Lorraine
Datum der Veröffentlichung: 06.04.2020
Letzte Änderung: 06.04.2020