CfP/CfA Veranstaltungen

Musique(s) dans la création littéraire et artistique francophone de l’Atlantique noir

Beginn
08.04.2021
Ende
09.04.2021
Deadline Abstract
01.11.2020

Colloque international transdisciplinaire

International transdiciplinary Colloquium

Musique(s) dans la création littéraire et artistique francophone de l’Atlantique noir

Music (s) in the literary and artistic creation of the French-speaking Black Atlantic

8-9 avril 2021

Appel à communications/ call for papers.

Université de Cergy Pontoise / Forum de Vauréal

English below

 « Etudier la place de la musique dans l’Atlantique noir, c’est examiner à la fois l’idée que se faisaient d’eux-mêmes les musiciens qui l’ont conçue, l’usage symbolique qu’en ont fait d’autres artistes et écrivains noirs et les rapports sociaux ayant produit et reproduit cette culture expressive unique, où la musique joue un rôle central et même fondateur[1] », déclare Paul Gilroy. Dans la continuité des travaux rassemblés dans L’Imaginaire musical dans les littératures africaines[2]  et dans Afrique, musique et écriture[3], ce colloque se propose d’étudier à la fois cette musique et la façon dont elle nourrit l’ensemble des pratiques artistiques et littéraire de l’Atlantique noir, et témoigne des rapports sociaux qui l’animent.

Les musiques de l’Atlantique noir, jazz et rap notamment, mais aussi biguine, reggae, funk, soul, et la liste reste ouverte, permettent de penser l’Atlantique noir comme un ensemble rhizomatique, dans lequel cultures et identités se construisent par rencontres et résurgences  : « La musique et ses rituels peuvent être utilisés pour créer un modèle où l’identité n’est plus conçue ni comme une essence immuable ni comme une construction vague et absolument contingente, susceptible d’être réinventée au gré de caprices des esthètes, des rhétoriciens et des faiseurs de symboles[4]. » L’étude de la façon dont les artistes construisent ces identités diasporiques en mobilisant la musique sera au cœur de nos réflexions.

La littérature francophone foisonne de références à la musique de l’Atlantique noir. Miano affirme que « Le jazz m’a donné ma voix d’auteur[5]. » Cette déclaration trouve de nombreux échos chez d’autres auteur.trices afro-français comme Koffi Kwahulé ou Kossi Efoui, ou chez des auteurs des Caraïbes comme Edouard Glissant qui déclarait lors d’une conférence à Ixtasou « mon style d’écriture est le style de jazz de Miles Davis[6] ». Ces multiples références musicales signalent à la fois une influence formelle du jazz sur l’écriture - influence perceptible par exemple dans la ponctuation ou dans le jeu des voix narratives -, et une influence qu’on pourrait dire philosophique : le jazz est la musique de la rencontre, de l’ouverture à l’altérité et du jeu avec les codes du langage.

La présence de la musique dans la littérature afro-française ne se limite pas au jazz : la verve provocatrice de Sami Tchak peut évoquer le rap à la fois par l’usage des métaphores, par l’évocation de la pauvreté et par le jeu avec l’obscène ; Gaël Faye, à la fois écrivain et rappeur, invite aussi à penser le rapprochement de ces deux formes ; Léonora Miano cite dans Blues pour Elise des morceaux de soul et de la rappeuse Casey ;  Ernest Pépin dans Tambour-Babel évoque à la fois le gwoka de la Guadeloupe et de nombreuses références de la musique mondiale, du jazz au Boléro de Ravel.

Mais la musique n’est pas seulement un art qui nourrit la littérature et ses genres. Jouant avec les mots, les sons et les sens, le rap invente une poésie sonore originale en perpétuelle transformation. Pratique artistique résolument nomade, il est une création continue. « Art de la débrouille » comme le nomme Nicolas Baltzer, fondateur de l’Abcdr du Son, il modifie la forme et le rythme mais également varie et imprègne l’espace de création et de réception. Dans un corps à cri avec la société, il fait entrer la rue et ses pratiques dans le studio, l’atelier et sur la scène. Toute une génération d’artistes contemporains (sculpteurs, vidéastes, photographes, peintres, danseurs …) a grandi et crée en écoutant du rap. Street art ou graffiti, le rap appartient à la culture hip hop et bon nombre de rappeurs sont graffeurs. Fabe de Scred Connexion eut autant d’influence dans le rap que dans le graffiti. Plus récemment, à l’opéra Bastille en 2019, Bintou Dembélé pour la mise en scène des Indes Galantes de Rameau a fait appel au hip-hop et au krump. Il est donc nécessaire d’étudier comment les arts vivants s’emparent de ces formes musicales contemporaines.

Ainsi, le colloque est pensé autour de deux grands axes :

Axe 1 : musiques et patrimoine 

Selon Paul Gilroy, la musique permet de résoudre la tension entre particularismes nationaux et identité noire immuable : s’il existe bien des traits caractéristiques de la musique noire), celle-ci a aussi servi à définir des patrimoines nationaux (le reggae est d’abord jamaïcain, le hip-hop étasunien, etc.)

Il s’agira donc de voir :

Quelle relation entretiennent les auteurs et autrices avec le patrimoine musical ? Comment le fixent ils/elles dans leur œuvre ou au contraire le modifient et le renouvellent ? Quelles sont les effets des circulations culturelles sur les constructions identitaires plus ou moins problématiques des personnages ? Est-ce pour créer un paysage à la fois musical et littéraire qui permettrait de mobiliser des modèles comme Emmanuel Dongala dans Jazz et vin de palme ou Daniel Maximin dans l’Isolé Soleil ?

Axe 2 : musiques et performances

Un autre versant de notre propos concernera l’étude des « traditions de performance qui caractérisent encore aujourd’hui la production et la réception des musiques de la diaspora.[7] » Pour Christian Béthune, le jazz comme le rap illustrent la tendance de la culture afro-américaine, culture qui trouve, d’après le chercheur, un prolongement dans le rap français, à mêler écriture et oralité : opter pour une écriture-jazz à la manière de Kwahulé serait alors une façon d’échapper à la sclérose de l’écrit et de retrouver cet équilibre de l’écrit et de l’oral.

Des communications sont également attendues sur la performance dans les musiques de l’Atlantique noir ou dans les diverses pratiques artistiques qui s’en inspirent. On pourrait ainsi étudier les procédés par lesquels l’influence musicale ouvre de nouvelles possibilités formelles, jusqu’à remettre en question les représentations traditionnelles du livre, des arts vivants et des arts plastiques comme forme et œuvre autonomes.

Un titre et un résumé d’environ 150 mots en français ou en anglais, accompagnés d’une brève notice bio-bibliographique devront être envoyés avant le 1er novembre 2020 aux adresses suivantes : sylvie.brodziak@cyu.fr et marion.coste@cyu.fr

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English :

“To study the place of music in the black Atlantic is to examine both the idea that the musicians who conceived it had of themselves, the symbolic use that other black artists and writers made of it and the social relationships that produced and reproduced this unique expressive culture, where music plays a central and even defining role ”, Paul Gilroy says. Following on from the work brought together in L'Imaginaire musical dans les littératures africaines (Mangoua, 2009) and in Afrique, musique et écriture (Teulié, 2001), this conference aims to study both this music and the way it nourishes all the artistic and literary practices of the Black Atlantic, and testifies to the social relationships which animate it.

The music of the black Atlantic, jazz and rap in particular, but also beguine, reggae, funk, soul, the list goes on, allow us to think of the black Atlantic as a rhizomatic set, in which cultures and identities are built by meetings and resurgences: “Music and its rituals can be used to create a model where identity is no longer conceived either as an immutable essence or as a vague and absolutely contingent construction, capable of being reinvented at the whim of aesthetes , rhetoricians and symbol makers . ” The study of how artists build these diasporic identities by mobilizing music will be at the heart of our reflections.

French literature abounds with references to the music of the black Atlantic. Miano says, “Jazz gave me my voice as an author ”. This declaration finds many echoes in other Afro-French authors such as Koffi Kwahulé or Kossi Efoui, or in Caribbean authors like Edouard Glissant who declared at a conference in Ixtasou “My writing style is the style of Davis Miles’ jazz”. These multiple musical references highlights both a formal influence of jazz on writing - a perceptible influence for example in punctuation or in the play of narrative voices - and an influence that could be said to be philosophical : jazz is the music of encounter, of openness to otherness and of playing with the codes of composition rules.

The presence of music in Afro-French literature is not limited to jazz: the provocative flair of Sami Tchak can evoke rap both by using metaphors, by evoking poverty and by playing with the obscene; Gaël Faye, both a writer and a rapper, also invites us to think about bringing these two forms together; Léonora Miano quotes in Blues for Elise pieces of soul and of the rapper Casey; Ernest Pépin in Tambour-Babel describes both the gwoka of Guadeloupe and many references to world music, from jazz to Bolero by Ravel.

But music is not only an art that feeds literature and its genres. By playing with words, sounds and meanings, rap invents / creates an original sound poetry in perpetual transformation. A resolutely nomadic artistic practice, it is a continuous (never-ending?) creation. “An art of resourcefulness” as Nicolas Baltzer, founder of the Sound Abcdr calls it, it modifies the form and the rhythm but also varies and permeates the space of creation and reception. Hand to hand with society, he (it? Le rap ou Nicolas ?) brings the street and its practices into the studio, the workshop and on  stage. A whole generation of contemporary artists (sculptors, videographers, photographers, painters, dancers ...) grew up and created their artworks by listening to rap. Like Street art or graffiti, rap belongs to hip hop culture and many rappers are graffiti artists. Fabe from Scred Connexion had as much influence in rap as in graffiti. More recently, at the Bastille Opera in 2019, Bintou Dembélé used hip-hop and krump for his choreography of the Indes Galantes by Rameau. It is therefore necessary to study how the living arts take hold of these contemporary musical forms.

Thus, the conference is designed around two main axes :

Axis 1: music and heritage

According to Paul Gilroy, music makes it possible to resolve the tension between national particularisms and unchanging black identity: if there are many characteristic traits common to all black music, it also served to define national heritage (reggae is / was first a Jamaican style, hip hop is American, etc.)

So it will be a matter of seeing :

What relationship do the authors have with musical heritage? How do they fix it in their work or, on the contrary, modify and renew it? What are the effects of cultural circulation on the more or less problematic identity constructions of the characters? Do these works seek to create a landscape that is both musical and literary that would allow models to be mobilized?

Is it to create a landscape that is both musical and literary that would mobilize models like Emmanuel Dongala in Jazz et vin de palme or Daniel Maximin in L'Isolé Soleil?

Axis 2: musics and performances

Another side of our talks will tackle / address the study of “performance traditions that still characterize the production and reception of diaspora music today ”. For Christian Béthune, jazz as well as rap illustrate the tendency of African-American culture, a culture which, according to the researcher, finds an extension in French rap, to mix writing and orality : opt for writing-jazz to Kwahule's way would then be a way of escaping the sclerosis of the written word and of finding this balance between the written and the oral.

Papers are also expected on performance in the music of the Black Atlantic or in the various artistic practices which are inspired by it. We could thus study the procedures by which musical influence opens new formal possibilities, to the point of calling into question traditional representations of the book, of the living and plastic arts as autonomous form and work.

A title and an abstract of approximately 150 words in French or English, accompanied by a brief bio-bibliographic notice must be sent before November 1, 2020 to the following addresses: sylvie.brodziak@cyu.fr and marion.coste@cyu.fr

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Grand invité : Daniel Maximin (spectacle avec Alain Jean Marie)

Grand invité 2 : en négociation

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Bibliographie indicative :  

  • Amiri Baraka, Le peuple du blues, trad. Jacqueline Bernard, Paris, Gallimard, 1963

—, Black Music, New York, Akashic Books, 2010 [1968]

—, Musique noire, trad. J. Morini et Y. Hucher, Paris, Buchet-Chastel, 1969.

  • Julien Barret, Le rap ou l’artisanat de la rime, Paris, l’Harmattan, 2011.
  • Tahar Bekri (dir.) Parole et Musique, Notre Librairie, n°154, 2004.
  • Christian Béthune, Le Rap, une esthétique hors la loi, Paris, Autrement, 2003.
  • Christian Béthune, Le Jazz et l’occident, Paris, Klincksieck, 2008.
  • Sylvie Chalaye, Pierre Letessier (dir.), Ecriture et improvisation : le modèle jazz ? collection « esthétique jazz », Paris, Passage(s), 2016.
  • Pénélope Dechaufour, Afropea, un territoire culturel à inventer, revue Africulture n° 100, Paris, Harmattan, 2015.
  • Colas Duflo, Pierre Sauvanet, Jazzs, Paris, MF, 2008.
  • Robert Fotsing Mangoua (dir.), L’Imaginaire musical dans les littératures africaines, Paris, L’Harmattan Cameroun, 2009.
  • Paul Gilroy, L’Atlantique Noir, modernité et double conscience, traduit par Charlotte Nordmann, Paris, Amsterdam, 2010.
  • Jason Herbeck, « Jusqu’aux limites de l’improvisation » : Caribbean Identity and Jazz in Daniel Maximin’s l’Isole Soleil, in Dalhousie French Studies, Halifax, volume 71, 2005, pp ; 161-175. 
  • Raphaël Imbert, Jazz Suprême,initiés, mystiques et prophètes, Paris, Editions de l’éclat, 2014.
  • Koffi Kwahulé, Gilles Mouëllic, Frères de son, Montreuil, éditions Théâtrales, 2007.
  • Aude Locattelli, Jazz belles-lettres. Approche comparatiste des rapports du jazz et de la littérature, Paris, Classiques Garnier, 2011.
  • Franck Medioni, Le goût du jazz, Le Mercure de France, 2009.
  • Léonora Miano, Habiter la frontière, Paris, L’Arche, 2012.
  • Léonora Miano, L’impératif transgressif, Paris, L’Arche, 2015.
  • Gilles Mouëllic, Le jazz, une esthétique du XXe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2000.
  • Philippe Paraire, Philosophie du blues. Une éthique de l’errance solitaire, Les éditions de l’Épervier, 2012.
  • Emmanuel Parent, Jazz Power, Anthropologie de la condition noire chez Ralph Ellison, Paris, CNRS éditions, 2015.
  • Véronique Petetin, « Slam, rap et « mondialité » », revue Études 2009/6 (Tome 410), p. 797 à 808.
  • Alexandre Pierrepont, PIERREPONT, Le champ jazzistique, Marseille, Parenthèses, 2002.
  • Yannick Séité, Le jazz, à la lettre, Paris, PUF, 2010.
  • Gilles Teulié (dir.), Afrique, musique et écriture, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, collection « Les cahiers du CERPANAC », 2001.
  • L’obsession du rap, classiques et instantanés du Rap français, Abcdrduson, Paris, Marabout, 2019.

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Comité organisateur/ Organizing comittee

  • Sylvie Brodziak (Littéraire, laboratoire AGORA),
  • Marion Coste (Littéraire, laboratoire AGORA),
  • Delphine Poulain (Communication, CY),
  • Aurélie Vandenborn (directrice de la scène Forum de Vauréal),
  • Caroline Chantegreil (Service culturel CY),
  • Adeline Hecker (Service culturel CY),
  • Thibault Urbain (bibliothécaire ; Bibliothèque universitaire les Cerclades.)

Comité scientifique (outre les organisateurs) / Scientific committee (in addition to the organizers)

  • Laetitia Brancovan (Littéraire, laboratoire EurOrbem)
  • Christiane Chaulet Achour (Littéraire, laboratoire Agora) 
  • Claude Coste (Littéraire, laboratoire Agora)
  • Mamadou Drame Fastef (Linguiste, université Cheikh Anta Diop de Dakar.) 
  • Anne-Marie Petitjean (Littéraire, laboratoire Agora).
  • Christophe Rey (Linguiste, laboratoire LT2I)
  • Raphaëlle Tchamitchian (Littéraire -Etudes théâtrales, laboratoire SeFeA)

     

[1] Paul Gilroy, Atlantique noir, p. 114.

[2] Robert Fotsing Mangoua (dir.), L’Imaginaire musical dans les littératures africaines, Paris, L’Harmattan Cameroun, 2009.

[3] Gilles Teulié (dir.), Afrique, musique et écriture, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, collection « Les cahiers du CERPANAC », 2001.

[4] Paul Gilroy, Atlantique noir, p. 151.

[5] Leonora Miano, Habiter la frontière, p. 17.

[6] Ces propos sont rapportés par Jean-Luc Tamby dans un article qu’on trouvera ici : http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?edouard-glissant-et-les-partis.html#nb30

[7] Paul Gilroy, L’Atlantique noir, p. 115.

Quelle der Beschreibung: Information des Anbieters

Forschungsgebiete

Französische Literatur, Literatur und Musik/Sound Studies
Black Atlantic

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Ansprechpartner

Einrichtungen

Université de Cergy-Pontoise
Datum der Veröffentlichung: 19.06.2020
Letzte Änderung: 19.06.2020